Le 6 mars 2015, Santiago Reyes danse sans discontinuer le long d’un trajet qui le mène de son atelier à Noisy-le-Sec jusqu’au MAC VAL à Vitry-sur-Seine, empruntant le tramway et le bus sous le regard des passants et passagers. Il est suivi par un public invité, à la fois les témoins et acteurs de son intervention.
À son arrivée au MAC VAL, à l’image d’une danse de Saint Guy, les mouvements de Santiago Reyes contaminent la communauté éphémère de visiteurs réunie le soir même pour le vernissage de l’exposition. À l’issue de la performance, il dépose son t-shirt dans cette vitrine-reliquaire exposant ce qu’il reste de l’énoncé programmatique « Ce qui est dansé, personne de me l’enlève ».
Le corps de l’artiste est non seulement envisagé, selon une conception nietzschéenne, comme un « je en action », mais il manifeste surtout un joyeux désir libertaire. Santiago Reyes affirme par la danse, une dépense inutile et jubilatoire, la primauté de sa liberté individuelle sur tout projet collectif, politique, dominant, nous renvoyant alors aux positions radicales d’Emma Goldman, militante féministe et anarchiste de la fin du XIXe siècle. « Si je ne peux pas danser, je ne veux pas prendre part à votre révolution ».
Un soir, alors qu’elle danse au milieu de ses compagnons d’armes, ceux-ci la blâment pour cette légèreté insultante au sérieux de la Cause. « Selon moi, une cause qui défendait un si bel idéal, qui luttait pour l’anarchie, la libération et la liberté, contre les idées reçues et les préjugés, une telle cause ne pouvait exiger que l’on renonce à la vie et à la joie ».